Point de vue

Quelle expérience consommateur aimeriez-vous vivre avec votre propre marque ?

Comme le remarquait récemment un collaborateur d’un grand constructeur automobile à l’occasion d’une conférence sur la qualité de service des marques  « Ça fait bien longtemps que les membres de notre comité de direction ne viennent plus acheter leurs voitures en concessions ».

Dommage, en effet mais malheureusement pas exceptionnel. Combien de dirigeant(e)s d’entreprises prennent encore le temps de vivre l’expérience réellement vécue chaque jour par leurs clients ? Peu. Très peu.
Pour leur trouver des excuses, on peut avancer qu’ils ont sans doute d’autres choses plus importantes à faire. Ou que c’est le rôle des équipes de terrain. Ou qu’enfin, « on connaît bien nos clients, croyez-moi. On consacre beaucoup de temps à traiter leurs réclamations ». Certes.

Mais au-delà des bugs, depuis combien de temps n’avez-vous pas pris le temps d’aller en magasin ou sur votre site pour acheter l’un des produits sur lesquels vous travaillez avec acharnement toute l’année ? De quand date votre dernière visite à votre call center pour écouter les échanges avec vos prospects ? Quand avez-vous reçu la dernière newsletter de votre marque ?

L’exercice consistant à se mettre à la place du client est toujours compliqué. Il implique de savoir oublier l’extraordinaire complexité de ce qui se passe en coulisse, de la performance et de la somme d’efforts qu’il faut accomplir pour offrir un produit ou un service digne de ce nom. Dès que la journée de travail commence, le cerveau bascule en mode "pro" et oublie tout ce qu’il emmagasine lorsque nous sommes en situation de consommateurs. C’est regrettable mais finalement assez logique.

C’est la raison pour laquelle il y a désormais un fauteuil rouge autour de la table du comité de direction d’Air France. Symboliquement, c'est celui du client. Ajoutez à cela que ces messieurs-dames du CoDir sont invité(e)s à appeler régulièrement des clients mécontents et la cause du client prend tout de suite une autre dimension.

Les organisations sont, comme les individus, résistantes à leur propre remise en cause. Rencontrant chaque année de nombreuses entreprises, combien de fois avons-nous été confrontés à l’inévitable « C’est comme ça » ? Il y a une forme de renoncement ou, à minima, une grande difficulté à remettre certaines pratiques en questions.

Faire un pas de côté, envisager la situation avec un regard différent est un exercice complexe. Dès qu’on intègre une organisation, on en épouse la cause. Les défauts ont toujours une explication et il devient très difficile d'évaluer l’organisation du point de vue de celles et ceux à qui elle est pourtant destinée. Pourtant, c’est dans ces espaces qu’on pense figés, dans les anfractuosités obscures de l’entreprise que naissent les opportunités si bien exploitées par Über et compagnie.

Maintenir le contact avec la réalité

Maintenir le contact avec la réalité des consommateurs est un exercice de salubrité pour les marques. Les entreprises ne peuvent plus se permettre de fonctionner hors sol. C’est fou l’information utile qu’il est ainsi possible de collecter, sans grands efforts. C’est, par exemple, ce qu'a pris le temps de faire Alexandre Bompard après la fusion entre la Fnac et Darty. Pendant quelques mois, il a passé certains samedis dans les magasins de son groupe. Sans aller jusqu’à acheter un lave linge à chaque fois, ces visites ont souvent donné lieu à un achat, (presque) comme un client lambda. Une habitude qu’il jugeait indispensable à son métier de commerçant, sans compter les effets managériaux sur les collaborateurs des deux enseignes, à un moment particulièrement délicat de leurs histoires.

En digital, l’exercice est tout aussi salutaire. Combien d’erreurs grossières seraient évitées si les collaborateurs et dirigeants des marques ou organisations prenaient le temps de visiter leur site plus régulièrement, de commander et recevoir un produit, de déposer une demande ou d’entrer en contact avec le call center ?

Au-delà de l’utilité opérationnelle de la démarche, la posture consistant à vivre sa marque comme le font les clients est forcément vertueuse : elle entretient la fraicheur du regard et contribue à redonner du sens à l'engagement de chacun dans la vie de l'entreprise.

Ce qu’il faut retenir :

  1. Méfions-nous de la connaissance que nous pensons détenir à propos de nos produits ou services. Personne ne les connaît mieux que nos clients ou utilisateurs.
  2. En vivant réellement l’expérience proposée, et en s’efforçant de le faire en vrai client, non seulement on fait émerger des points de progrès immédiats mais on redonne un sens aux actes et aux décisions qui impliquent les collaborateurs de l’entreprise.

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